Ali Miaoui: «l’ouverture du ciel tunisien ne fait pas peur à Tunisair» | Tourismag.com
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Après une année 2007 très difficile, Tunisair a réussi à sortir indemne d’un trou d’air. Malgré une conjoncture morose, la compagnie a enregistré des résultats record en 2008 grâce à une politique de rationalisation de son réseau commercial et à la filialisation accrue de plusieurs de ses activités. Mieux, Tunisair s’apprête aujourd’hui à franchir un nouveau cap sur le chemin de la rentabilisation de son réseau et affiche l’ambition de leadership sur la rive sud de la Méditerranée grâce à un important coup de lifting qu’elle donnera à sa flotte. Dans l’entretien qu’il a accordé à « TourisMag », Ali Miaoui,  directeur central du produit à la compagnie publique revient longuement sur les ambitions et les défis du transporteur durant les années à venir. Interview…

TourisMag : Votre compagnie s’est engagée dans un ambitieux programme de renouvellement de sa flotte. Comment comptez-vous financer ce programme d’acquisition d’appareils auprès d’Airbus à l’heure où le gouvernement tunisien a décidé de ne pas sortir sur le marché financier international et de mobiliser les ressources nécessaires au budget de l'Etat exclusivement sur le marché local ? Avez-vous déjà entamé des contactes avec des banques locales ?

Ali Miaoui:
En fait, l’achat des appareils va se faire sur une longue période. L’arrivée des nouveaux appareils sera progressive au même titre que le financement. Je m’explique : si on reçoit un avion en 2010, le financement concernera un seul appareil. On a déjà  contacté toutes les banques tunisiennes. Mais les fonds ne seront pas levés uniquement sur le marché local puisque la faible disponibilités des liquidités sur le marché financier international  devrait concerner l’année 2009 uniquement. Il y aura un pool des banques engagées avec nous pour financer l’acquisition des Airbus. on combinera le marché local et celui étranger. Pour l’heure, le marché local nous permet de subvenir à nos besoins.

TourisMag : Vous êtes en négociations avec Airbus pour avancer les délais de livraison des appareils command. Pourquoi avez-vous pris cette décision et à quand vous prévoyez l’arrivée des premiers appareils ?

Ali Miaoui: Avant de commander les avions, on a élaboré un business plan pour une période de 10 ans en fonction de la stratégie de croissance la compagnie. Aujourd’hui on a 30 avions et nous savons que pour 2010 on aura besoin de 32 avions. C’est donc en fonction de notre stratégie que nous avons acheté les appareils. 
Au départ, les responsables d’Airbus nous ont dit qu’ils ne pouvaient pas nous livrer d’avion en 2010 mais avec la crise ils nous ont confirmé la possibilité de nous livrer un premier avion par anticipation. Ils nous ont proposé donc d’avancer les délais. Ainsi et pour 2010 et au lieu d’avoir 2 avions affrétés, nous aurons un seul, le deuxième avion vecteur de la croissance sera notre appareil.

Nous sommes également  entrain d’examiner la possibilité d’anticiper la réception de 2 autres Airbus de type A330  cette fois ci pour fin 2010 et début 2011. C’est encore en cours étude. Rien n’est décidé.


TourisMag : Le développement de l’industrie aéronautique tunisienne va-t-il contribuer à faire chuter les coûts de la maintenance des avions de Tunisair. L’accord signé avec Airbus relatif à l’installation d’une usine en Tunisie comprend-t-il une clause prévoyant des prix avantageux pour la compagnie nationale pour les pièces de rechange ?

Ali Miaoui:
Tunisair a filialisé l’activité de la maintenance de ses avions à travers la création de  Tunisair Technics. Nous sommes entrain de  pousser notre filiale à être plus compétitive.  La mise en place du projet de partenariat industriel entre la Tunisie et Airbus n’aura aucune incidence sur l’activité de maintenance de Tunisair. La nouvelle usine d’Airbus va produire ici  des sous ensembles et d’autres équipements puis les envoyer par fret en France pour l’assemblage. Cela aura des retombées positive sur l’économie tunisienne. D’autant plus que l’implantation d’Airbus favorisera la création d’emplois. C’est aussi un nouveau bon référencement de la Tunisie en matière de valeur ajoutée

TourisMag: L’Association Internationale du Transport aérien (IATA)  prévoit des baisse de  3% du trafic des passagers et de 5% du trafic cargo en 2009. A la lumière de ces données, Tunis Air devrait-t-elle revoir son optimisme pour 2009 surtout que la visibilité est réduite sur le plan touristique avec l’attentisme de la part des Tours Opérateurs ?

Ali Miaoui:
Tunisair prévoyait une croissance de 12 à 13% en 2009. A la lumière de la crise on a tempéré à 8/9%. On a voulu garder volontairement une vision ambitieuse pour 2009. Une vision réduite certes mais on n’a pas révisé fondamentalement le taux de croissance objectif de notre activité. 2009 c’est une année  qui constituera un peu un tournant vu qu’il y aura à la fin de l'année la libéralisation du ciel en Tunisie. Tunisair veut et doit maintenir le cap en termes de croissance. A défaut d'avoir un marché global en progression, cette fois-ci la croissance se fera essentiellement par la récupération de parts de marché. Nous tenterons de grignoter sur les parts des marchés des autres compagnies aériennes. C’est ce qui explique qu’on est plus agressif sur le plan commercial. Il ne s’agit pas d’un optimisme béat mais d’un optimisme actif.  

TourisMag : L’ouverture du ciel qui deviendra sous peu une réalité fait-elle peur au management de Tunisair ?

Ali Miaoui:
Pas du tout. Nous sommes sereins mais en même temps on ne croise pas les bras. Notre stratégie commerciale basée sur le délestage des vols charter déficitaires depuis 2007 visait à nous préparer à un ciel ouvert prévu pour 2010. Cela nous permet d’être plus confiants. Il fallait préparer l’activité régulière, mettre en place une tarification avantageuse qui nous permette d’avoir une dynamique dans notre offre. Cette politique qui a été adoptée en 2008 a donné des chiffres record. Je vous explique autrement : si 60% de notre activité reposait sur l'activité charter et 40% uniquement sur le régulier, dès qu’il y a un problème ou arrivée des low-cost on est pris dans la spirale d'une concurrence rude sans pouvoir riposter sur une majeure partie  de notre activité. Le fait qu’on ait diminué le poids du charter, nous met à l’abri du danger. En 2007, on était à hauteur  de 57% de vols réguliers et  43%  de vols charter. En 2009, nous sommes à  60% en régulier et à 40% en  charter.  Cette tendance devrait se poursuivre durant les prochaines années. Bref, l’ouverture du ciel nous faisait peur il y a deux  ans. Aujourd’hui, on y est préparé.

TourisMag : La fusion entre Nouvelair et Karthago bénéficie certes au pavillon tunisien mais risque-t-elle de réduire les parts de marché de Tunisair ?

Ali Miaoui: En 2009 qui s’annonce particulière, Tunisair va augmenter sa part de marché au détriment de tous les pavillons. La fusion est importante certes,  mais tout dépend de leur stratégie. On attend de voir si 1+1=1 ou 1+1=2 !!
Et puis, on peut développer des synergies avec eux.  Il y a des complémentarités possibles sur certains marchés.
Pour le régulier on va réfléchir ensemble pour améliorer nos parts de marché.  C’est dans l’intérêt des trois  compagnies.  Sur les trois prochaines années, on se prépare pour être forts face au pavillon européen. La compétition doit se faire entre le  pavillon tunisien et celui européen et non pas au sein du pavillon tunisien.

TourisMag : Que faites-vous pour stopper l’exode des pilotes tunisiens séduits par d’autres compagnies européennes ou du Golfe? Le mouvement de la fuite des pilotes a-t-il baissé ?
Ali Miaoui:
le mouvement de fuite s’est complètement tari. Tunisair a discuté avec le syndicat des pilotes  pour améliorer leurs conditions de travail afin de stabiliser le personnel navigant.  Lors du récent Conseil Ministériel restreint consacré au transport,  un certain nombre de décisions ont été prises, dont notamment la création d’un nouveau centre de formation des pilotes. Il importe de noter que nos pilotes ont une bonne réputation, surtout en matière d’atterrissage.  C’est un secret de la maison.
 
TourisMag: Qu’en est-il de l’augmentation du capital de Mauritania Airways, filiale de Tunisair et quelles sont les  ambitions de cette compagnie  en Afrique ?

Ali Miaoui:
En général, l’avenir de Tunisair va se décider sur le réseau traditionnel en Europe.  Néanmoins l’Afrique occupe une place de choix dans notre stratégie de développement puisque à travers notre hub de Tunis nous offrons des connexions de plus en plus importantes entre l'Afrique et le Moyen orient et l'Afrique et le sud de l'Europe , nous sommes la seule compagnie qui dispose d'une telle offre en termes de trafic transversal. C’est l’un des points forts de Tunisair. Dans ce cadre Mauritania Airways va jouer un rôle moteur.
Le rôle de Mauritania Airways qui était au départ d’assurer des dessertes domestiques  et quelques vols internationaux pour le marché mauritanien va évoluer vers une compagnie offrant un produit complémentaire avec Tunisair sa maison mère tout en répondant aux besoins du  marché mauritanien. Le nouveau programme devrait démarrer en avril 2009. Donc, en plus des lignes domestiques (= 5 points) elle va desservir Dakar, Banjul, Abidjan, Conakry,  Bamako, Libreville, Brazzaville assurant ainsi une bonne couverture sur l’Afrique de l’ouest et multipliant les correspondances avec le sud de l’Europe.

TourisMag : Quand prévoyez vous le lancement de la  ligne Tunis-Montréal ?

Ali Miaoui:
Ça sera au plus tôt en avril 2011 et plus tard avril 2012 avec deux ou trois fréquences la première année. Tout dépendra de la date de réception des nouveaux Airbus A 330. Mais déjà on va avoir l’association des Tour-opérateurs  canadiens qui devraient venir pour leur congrès en avril 2009. Tunisair va ramener les participants de Paris et ça sera la première opération avec les canadiens.

En 2013, nous devrions ajouter Shanghai ou Pékin.

 

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