By walidK

Les médias français semblent avoir un nouveau sujet de prédilection, qui confine parfois à l'obsession :  les camps d'entrainement djihadistes en Tunisie.

Reportages et révélations fracassantes se sont succédées ces derniers mois à ce sujet. Le dernier en date a été un reportage diffusé le lundi 29 octobre  à 22h40  sur Canal+ dans "Spécial Investigation". Intitulé   "Islam radical : les djihadistes en embuscade", le reportage rappelle que "les salafistes autrefois confinés dans la clandestinité ou en prison ont profité des bouleversements des révolutions arabes pour sortir de l’ombre".  Ces fondamentalistes religieux n'ont, selon le même reportage,  qu'un seul projet : imposer la chariâa. 

Évoquant le cas d'Abou Yadh, leader des salafistes djihadistes d'Ansar Al-Chariâa en Tunisie, présente comme un  ex-partisan de Ben Laden,  le reportage affirme qu'Abou Yadh et ses partisans manifestent aujourd’hui publiquement pour mettre la pression sur le gouvernement. Le réalisateur du reportage précise qu'Abou Yadh affirme que "si le pouvoir en place (des islamistes plus modérés) ne les écoute pas, le recours au djihad, à l’action violente, sera légitime".

Le journaliste de "Spécial Investigation", Karim Redouani,  rappelle également qu'en février 2012, Ayman al-Zawahiri, le numéro 1 d’Al-Qaïda, a appelé les djihadistes de tous les pays à aller aider les rebelles syriens, en lutte contre le président Bachar al-Assad. 

Sources anonymes 

Dans un article publié dans son numéro 809 et, le 23 octobre, sur le site internet du même périodique,  le magazine français Marianne va plus loin en affirmant que la Tunisie abrite des camps d'entraînement djihadistes. "Deux, au moins, sont connus : l'un dans le Nord, dans la région de Tabarka, et l'autre dans le Sud, aux confins des trois frontières communes à la Tunisie, à la Libye et à l'Algérie, non loin de l'oasis libyenne de Ghadamès", précise  l'article, indiquant que "l'existence est un secret de Polichinelle".

Citant un diplomate européen sans donner aucun détail sur son identité, ni son pays d'origine, le journal indique que des services diplomatiques "ont informé les autorités tunisiennes qui n'ont pas réagi.» 

L'article en question cite aussi un haut responsable de la police tunisienne, qui affirme que  «les combattants formés à la guérilla dans les camps sont disséminés dans tout le pays, prêts à en découdre lorsque le jihad sera déclaré en Tunisie si l'instauration de l'Etat islamique ne se fait pas par la voie légale». 

Manque d'un travail d'investigation 

Faut-il croire les révélations de Canal+ et Marianne ? Ces deux médias ont fait appel à des  sources anonymes qui sont, selon les normes journalistiques, classés comme des sources faibles selon les règles des formes les plus nobles du journalisme, en l'occurrence le journalisme d'agence. Les deux médias n'ont pas également fait appel à un travail d'investigation ou, du moins, d'un vrai travail de terrain.

Réagissant à toutes ces révélations, le ministère de l'Intérieur a démenti officiellement les informations publiées dernièrement par un périodique français sans le citer et repris par  des médias tunisiens relatives à l’existence de deux camps d’entraînement Djihadistes en Tunisie. Le communiqué publié mardi 30 octobre sur la page Facebook du du ministère de l’Intérieur, affirme que "les forces de sécurité intérieure et les unités de l’armée nationale coopèrent et collaborent tout en restant vigilantes pour protéger les frontières du pays et prévenir contre les dangers pouvant  menacer la sécurité de la Tunisie". 

Malgré ce démenti officiel, le mal est fait.  Et pour cause :  la page Facebook du ministère de l’Intérieur ne peut en aucun cas rivaliser avec le taux de pénétration d’une télévision française comme Canal+  . Les dégâts sur l'image de marque de la Tunisie sont très importants et nécessitent plus qu'un communiqué afin que des secteurs stratégiques comme le tourisme ou l'investissement ne s'en ressentent pas outre mesure... 

 

W.K