Mohamed Belajouza est plus qu’un chevronné du tourisme et de l’hôtellerie en Tunisie. Il vient de succéder à Feu Kamel Boujebel à la tête de la Fédération Tunisienne de l’Hôtellerie (FTH) et il avoue qu’il a du pain sur la planche. En effet, nombreuses sont les difficultés qui entravent l’épanouissement de la profession. Lui qui a commencé depuis les premières années de ce secteur, a partagé ses soucis avec TourisMag et dévoilé ses projets et défis majeurs pour la période à venir.

TourisMag : Quels sont vos objectifs majeurs à la tête de la FTH ?

Mohamed Belajouza : Je pense que nous avons trois principaux problèmes sur la planche. Tout d’abord, on est appelés à la restructuration de la fédération qui sera financée par l’Agence Française de Développement (AFD). Ce projet permettra de redéfinir les nouvelles structures de la FTH et de répartir les responsabilités entre les fédérations nationales et les fédérations régionales ; lesquelles sont des missions qui seront facilitées par la volonté et la conviction du ministre de faire participer la FTH aux principales prises de décision.

Ensuite, le bureau actuel de la FTH sera confronté à un second défi à savoir l’endettement du secteur hôtelier qui s’élève aujourd’hui à 3 mille milliards. On procédera de manière à trouver un terrain d’entente avec les bailleurs de fonds afin de conclure un accord. Ce qui représente à mon sens le grand dossier.

En troisième lieu, il faudra assurer à la fédération la crédibilité et la représentativité adéquates à son poids économique. Dès lors que 30 à 40% des hôtels y sont affiliés, il faut alors qu’elle soit attractive et c’est justement à ce niveau que nous comptons en particulier et davantage sur les fédérations régionales. D’ailleurs j’en profite pour lancer un appel à toutes les bonnes volontés de la fédération.

TourisMag : A ce juste titre, vous ne pensez pas que la profession souffre d’un sérieux déficit de solidarité ?

Mohamed Belajouza : Sans aucun doute. Il s’agit en effet d’un manque de concertation qui joue en faveur des TO et qui frappe de plein fouet notre pouvoir de négociation. Ce dernier pèse alors très léger devant la concentration des TO qui gagne de plus en plus de terrain.

TourisMag : Quelles ont les conséquences de cette politique individualiste ?

Mohamed Belajouza : Cela se répercute indéniablement sur la qualité. Car, bon nombre de professionnels prônent la casse des prix qui représente à mon avis une politique de fuite en avant qui sert à remédier à des préoccupations immédiates. Pourtant, la solidarité est en mesure de résoudre plusieurs problèmes auxquels est confrontée la profession. Cette option nous permettra de fixer des normes minimales des services en fonction des catégories. On pourrait également mettre en place des prix plancher ou libeller les contrats en dollar et en euro.

TourisMag : Les professionnels sont mis aussi à l’index à cause de leur manque d’implication dans l’effort promotionnel.

Mohamed Belajouza : A mon sens, il faudrait que la contribution au budget de promotion soit conçue en tant qu’investissement et non pas une dépense. Il va sans dire que la destination Tunisie est en mal d’image et il est temps de remettre les pendules à l’heure. Nous sommes en train de perdre du terrain sur l’exploitation d’hiver et de se confirmer, en revanche, en tant que destination saisonnière.

TourisMag : Ce ne serait pas entre autres raisons à cause de la concurrence accrue ou de l’apparition du Low Cost par exemple ?

Mohamed Belajouza : Il n’y a aucun doute que des destinations comme Charm Cheikh ou Marrakech sont de plus en plus compétitives et nous causent du tort notamment en dehors de la saison estivale. Mais pour ce qui est du Low Cost, c’est une autre paire de manche. Certes, ce moyen de transport est destiné aux petits budgets. Mais il permet également aux gros budgets de voyager plusieurs fois dans l’année. Ce qui promet en l’occurrence en termes de tourisme résidentiel et de seniors.

TourisMag : En Tunisie, on déplore également le problème de qualité qui porte préjudice à la destination. Vous qui avez été témoin et acteur de la belle époque du tourisme tunisien, qu’en pensez-vous ?

Mohamed Belajouza : A l’exception de quelques unités, la qualité du produit hôtelier tunisien a largement baissé. Quand le secteur du tourisme démarrait à peine dans nos murs, la qualité était assurée par les premières promotions des grandes écoles. On avait commencé alors par les Palaces, soit le haut de gamme. Par la suite, nous avons tenté d’autres alternatives mais toujours en consacrant la qualité et le sourire qui faisaient ce bon temps. J’espère en tous cas qu’il y aura un retour vers les bonnes vieilles traditions afin de tirer le produit vers le haut et avoir une meilleure rémunération.

TourisMag : Pour conclure

Mohamed Belajouza : La profession, la profession, la profession.